La nouveauté de la transdisciplinarité au sein de l’université nécessite une force de propositions pour orienter la recherche. Cette journée d’études propose de traverser ensemble la complexité du concept de temps, en le tissant à travers différentes disciplines. Il s’agit de passer du pluridisciplinaire au transdisciplinaire.
Le confinement lié à la pandémie du coronavirus remet en question notre relation au temps, et semble provoquer l’effondrement des orientations temporelles classiques de linéarité et d’accélération vers le progrès (Hartog 2016). La pluralité des points de vue et des perspectives, ainsi que l’accélération technologique (Virilio 2010) absorbent les orientations canoniques d’un flux unitaire du temps. Si dans la culture numérique – où les interactions humaines se développent dans de nouveaux espaces géographiques et temporels – c’est l’instant qui domine la réalité, la vie confinée permet – par l’expérience insolite de la durée et de la solitude – de développer une nouvelle sensibilité face à la vie intense (Garcia 2016), et peut-être nous incite-t-elle à chercher une issue grâce aux interactions sociales : « Si l’accélération constitue le problème central de notre temps, la résonance peut être la solution. » (Rosa 2018). Ou encore, dans une toute autre perspective, la crise écologique annoncerait-elle le temps de l’apocalypse ? (Garcia 2013).
Qu’il s’agisse du temps chronométrique (Spagnou 2017) ou du temps logique en physique (André 2011), de la non-existence du temps en physique quantique (Klein 2002; Rovelli et Lem 2018), du temps vécu phénoménologique (Minkowski 2013), du flow psychologique (Csikszentmihalyi 2020), du temps social (Rosa 2013), du temps historique (Hartog 2016) ou archéologique (Evin 1994), du temps biologique (Atlan 2012), du temps écologique (Gemenne et al. 2019), économique (Le Saout 2019), législatif (Calmes-Brunet 2012), politique (Marrel et Payre 2018), linguistique (Barbazan et Kleiber 2006), littéraire (Stawiarski 2017), celui des arts du temps (Ribon 1997) ou des arts plastiques qui condensent le temps (Worms 2003), le vaste nuage sémantique concerné par un temps aux multiples terminologies est au cœur notre investigation scientifique transdisciplinaire.
Programme :
La journée d’étude accueillera des formats variés, dont des communications-performances ou présentations de recherches-créations, démarches communes à plusieurs intervenant·e·s et qui tient une place centrale à PRISM. Elle relèvera aussi le défi d’une journée entièrement virtuelle, que nous souhaitons saisir comme une invitation à penser des formes spécifiques pour la visio-conférence, et à imaginer les possibles créatifs de ce mode de communication.
Les propositions des intervenant·e·s seront organisées en quatre axes :
1. Le temps incarné / temps réel.
2. L’entre.
3. L’impermanence et le vide.
4. Le temps dans le processus de recherche-création.
Ces notions nous conduiront d’une proposition à l’autre, entre linguistique, philosophie, musicologie, études cinématographiques ou théâtrale, études sur la danse, et sciences humaines. Dans la matinée, il sera question de la temporalité de l’activité linguistique (Florian JULIEN), d’improvisation collective à distance (Baptistine MARCEL), de rêveries radiophoniques en temps réel (Crys ASLANIAN), du temps retrouvé dans l’image (Nathalie CONTENAY). Puis de la conscience du temps au théâtre (Fanny DELGADO), de l’inversion temporelle au cinéma (Séverine MATHIEU et Paul-Emmanuel ODIN) et du temps vécu comme passage et devenir (Noélie PLE). En deuxième partie de journée, nous nous intéresserons aux échanges entre réalité virtuelle et science-fiction (Léa DEDOLA), puis à ce que la physique quantique fait au cinéma de science-fiction (Panagioulia (Julie) KOLOVOU), et à la temporalité d’une chanson de Bob Dylan (Philippe USSEGLIO). Enfin, trois chercheur.es-créateur.ices, présenteront leur démarche : une investigation sur la temporalité des œuvres électro-acoustiques (Isotta TRASTEVERE), une chronologie dansée sur l’histoire du flamenco (Fernando LOPEZ RODRIGUEZ) et une performance autour de la danse comme expérience de rencontre (Muriel PIQUÉ), avant une conclusion générale sur le temps social historique comme processus d’altération/création (Hervé FAYOLLE).
Nuage sémantique :
Achronicité ; Acte-trace ; Altérité ; Auralité ; Buzzati et la fuite du temps ; Chanson ; Chronologie ; Chronophage ; Clôture ; Cinéma ; Création ; Danse ; Deep listening ; Diachronie ; Diastème ; Différence ; Durée ; Dylan ; Enfermement ; Espace-temps ; Espagne ; Esthétiques ; Expérimentations ; Fiction ; Film ; Flow ; Documentaire ; Flamenco ; Folie ; Fuite du temps ; Génération ; Histoire ; Histoire de la danse ; Image survivante ; Images et temps dialectiques ; Imaginaire ; Improvisation ; Instant ;Interrelation ; Khôra ; Langue(s) ; La pluie et la mémoire ; La recherche proustienne ; Latence ; Ligne ; Mémoire ; Mouvement ; Mythe d’Orphée Narration Organique Origine Passage Peinture Perçaction Perception Performance ; Phénoménologie ; Photographie ; Photographie installée ; Présence ; Présent ; Raeben ; Réalité virtuelle ; Recherche-création ; Renouveau ; Représentation du temps ; Rétrotemporalité ; Reprise ; Science-Fiction ; Sensation ; Séquence ; Seuil ; Significations ; Simultanéité ; Spéculation narrative ; Structuration du temps ; Synchronie ; Temporalité ; Temps ; Temps de l’altération/altérité ; Temps du corps ; Temps inversé ; Temps physique ; Temps psychique ; Temps réel ; Temps science-fictionnels ; Temps social historique ; Temps vécu ; Théâtre ; Trajectoires ; Variation ; Vide ; Vieillissement ; Vittorini et conversation en Sicile.
Bibliographie proposée :
André, Charles. 2011. Modèles de temps et de contraintes temporelles de MARTE et leurs applications. Report. INRIA.
Atlan, Henri. 2012. « Temps biologique et auto-organisation ». Communications 91(1):161‑69.
Barbazan, Muriel, et Georges Kleiber. 2006. Le temps verbal : dimensions linguistiques et psycholinguistiques. Toulouse : Presses universitaires du Mirail.
Calmes-Brunet, Sylvia. 2012. « Le temps du débat législatif ». Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux (10) : 81‑96.
Csikszentmihalyi, Mihaly. 2020. Finding Flow: The Psychology Of Engagement With Everyday Life. Basic Books.
Evin, Jacques. 1994. « Le temps et la chronométrie en archéologie ». Histoire & Mesure 9(3):239‑57.
Garcia, Ernest. 2013. « Car Le Temps Est Proche : La Crise Écologique et l’apocalypse sans Cesse Annoncée ». Socio-Anthropologie 28:117‑31.
Garcia, Tristan. 2016. La vie intense: une obsession moderne. Paris: Éditions Autrement.
Gemenne, François, Aleksandar Rankovic, Jan Zalasiewicz, et Bruno Latour. 2019. Atlas de l’anthropocène.
Hartog, François. 2016. « Vers une nouvelle condition historique ». Le Débat n° 188(1):169‑80.
Klein, Étienne. 2002. Le temps existe-t-il ? Paris: le Pommier.
Le Saout, Erwan. 2019. Introduction aux marchés financiers. 6e édition. Paris: Economica.
Marrel, Guillaume, et Renaud Payre. 2018. Temporalité(s) politique(s): le temps dans l’action politique collective. Louvain-la-Neuve: De Boeck supérieur.
Minkowski, Eugène. 2013. Le temps vécu: études phénoménologiques et psychopathologiques. 3e édition. Paris: Presses universitaires de France.
Ribon, Michel. 1997. L’art et l’or du temps: essai sur l’art et le temps. Paris: Ed. Kimé.
Rosa, Hartmut. 2013. Accélération: une critique sociale du temps suivi d’un entretien avec l’auteur. Paris: La Découverte.
Rosa, Hartmut. 2018. Résonance. Paris: La Découverte.
Rovelli, Carlo, et Sophie Lem. 2018. L’ordre du temps. Paris: Flammarion.
Spagnou, Pierre. 2017. Les mystères du temps: de Galilée à Einstein. Paris: CNRS Éditions.
Stawiarski, Marcin. 2017. « “ Démesure du temps : littérature et arts ” ». Polysèmes 17.
Virilio, Paul. 2010. Le grand accélérateur. Paris: Galilée.
Worms, Frédéric. 2003. « L’art et le temps chez Bergson. Un problème philosophique au cœur d’un moment historique ». Mil neuf cent. Revue d’histoire intellectuelle n° 21(1):153‑66.
Inscription et renseignements :